• « ... Alors, ça te dis ? »

    « Hein ? »

    Affalé sur ma table, je n'avais rien suivis de ce qu'elle m'avais dit. J'étais comme ça depuis le début du cours. J'avais une sorte de pressentiment étrange. En fait, je pouvais même dire que cette sensation s'était prolongée depuis mon réveil. Suika me regarda un instant avant d'éclater de rire.

    « Je disais donc, ça te dirais, de passer chez moi, après les cours ? »

    J'ai réfléchis un instant. Ca n'était pas une mauvaise idée.

    « Oui, pourquoi pas. »

    J'ai haussé les épaules et me suis ralongé sur ma table, jouant avec mon criterium, désespéré par la feuille blanche remplie de dessin devant moi. Ce n'est pas de ma faute, si je ne peux pas vivre sans dessiner...

     

    Envol difficile

    La journée est passée lentement. En raconter tout les détails ne la rendrait que plus ennuyante encore. Zappons donc à la récré de 16h, heure de sortie des cours... Suika m'attendais devant la salle de classe, toute sourire. Quoi ? Oui, je suis lent à ranger mes affaires, et alors ?

    Ca me fait penser. Je n'avais pas vu le mec aux cheveux blonds de la journée, fait étrange vu que je le voyais au moins une fois par jour (j'avais fait le compte, une fois que je m'ennuyais, et c'était presque devenu comme un rituel). Je soupirais et marchais à côté d'elle.

    « Tu comptes faire quoi pour la fête du lycée ? »

    « Hmh ? Oh, rien. Des potes voulaient qu'on joue un morceau. Mais je ne suis pas sûr que cela plaise à tout le monde. »

    « Encore du Visual Kei ? »

    « Toujours. »

    « Je vois. »

    Nous continuâmes à discuter pendant au moins un quart d'heure avant d'arriver devant une charmante maison - et cela me rassura de suite quant au fait d'être un gosse de riche. Elle avait l'air de l'être tout autant que moi, et tant mieux. Je me voyais mal l'inviter chez moi si elle vivait dans un petit appartement tout crasseux. Alors que j'avais presque une villa pour moi tout seul...

    « Voilà, c'est chez moi. Tu peux entrer. »

    « Merci... »

    Je me déchaussais et elle m'invita dans son salon avant de me servir un thé glacé. Je la remerciais et commençais à desserrer ma cravate - uniforme oblige - lorsque j'entendis un pas lourd retentir dans le couloir. 

    Un jeune homme fit alors irruption dans la pièce, l'air vachement énervé -peut-être autant que moi- et commença à crier.

    « Suika, bordel de merde, où t'as encore foutu mon lecteur mp3 ?! »

    « ... Onii-San ? Je n'y ai pas touché. »

    Je levais les yeux. En face de moi ce trouvait le lycéen aux cheveux blonds platine et aux yeux bleus cristallins. Mais que faisait-il là ? Est-ce qu'elle l'avait bien appelé... Grand-frère ? Hontô ? Ano shônen wa boku no kanojo no onii-san ? Arienai.* J'ai inspiré un grand coup.

    Ce qui a eu pour effet de le faire se tourner vers moi. Il m'a regardé de la tête aux pieds avant de gueuler de nouveau.

    « T'es qui, toi ? »

    « Le petit copain de Suika. »

    « Ah ouais ? » Il sembla chercher dans sa mémoire. « Ah, c'est toi le mec bizarre du lycée, toujours seul, les cheveux en bataille, l'air mécontent ? Ca m'reviens. Elle m'avait pas dit qu'elle sortait avec quelqu'un. Surtout pas avec toi. »

    « Arashi-kun, ça suffit ! »

    Arashi. Tempête. Ouais, ça lui allait bien, c'est le cas de le dire.

    « Toi, ta gueule, et retrouve moi ce putain de lecteur mp3, merde ! »

    Il sortit en claquant la porte. Suika soupira.

    « Je suis désolée. Il n'est pas comme ça, au lycée. »

    « Ce n'est rien. »

    Quelques heures passèrent et la nuit tomba avant que je ne me décide à la quitter.

    « Mais il fait nuit ! »

    « Justement. Je n'aime pas être dehors la nuit. Je ferais mieux d'y aller maintenant... »

    « D'accord... »

    Elle m'accompagna dans l'entrée, je remis mes chaussures puis, une fois relevé, elle m'attira vers elle et m'embrassa. Une étrange chaleur envahit mon corps.

    « Rentre bien. À demain ! »

    « À demain... »

    Je la saluait de la main avant de filer.

     

    Cela faisait une dizaine de minutes que je marchais. La nuit était tombée, et j'avais un peu de mal à me repérer – d'autant plus que je n'étais jamais venu chez Suika auparavant. Les lumières venait tout juste de s'allumer, et, au fur et à mesure, je réalisais que j'étais... Perdu. Totalement.

    J'avais mentit lorsque j'avais dis que je n'aimais pas être dehors la nuit. J'adorais la nuit, et je sortais toujours dès que j'en avais l'occasion, observer le monde plongé dans l'obscurité. C'était dans les moments comme cela que je me sentais vraiment moi, avec un mélange de mélancolie dont j'ignorais la provenance et de joie, de bien être... Je regrettait souvent d'habituer en ville, ne pouvant voir les étoiles, qui me passionnaient. La nuit m'avait toujours attiré, mais j'évitais d'en parler aux autres. Ils me trouvaient déjà suffisamment bizarre, je ne voulais pas empirer les choses...

     

    Plongé dans mes pensées, je sursautais quand un bruit retentit, venant du fil électrique situé au dessus de ma tête : c'était le croassement d'un corbeau. Levant les yeux, un peu paniqué, malgré moi, j'aperçus le magnifique animal, au plumage noir encre aux reflets bleuté, et aux yeux tellement noirs qu'on aurait pu s'y perdre. Je l'observais quelques instants, quand il s'envola, et je crus, durant un instant, qu'il avait disparu dans la nuit noire.

    Mais non ! Il réapparu et vint se poser... Juste devant moi. Je pris peur, mais il ne semblait pas malveillant. Il commença à voleter, se poser un peu plus loin, pour revenir vers moi, et je compris qu'il voulait que je lui suives. Je me retrouvais donc, en pleine nuit, à suivre un corbeau en pleins milieu de la ville, juste sur une intuition débile. Autant dire que je n'avais pas l'air fin.

    Plus tard, il y aurais une question que je me poserais souvent : si je n'avais pas suivi ce maudit animal – qui désignais aussi mon prénom – les choses auraient-elles été différentes ? Ou étais-je, de toute façon, destiné à ce qu'il allait m'arriver ? Sans doute ne le saurais-je jamais.

    J'arrivais devant une ruelle. Un peu bête, j'entrais dedans... Et je m'aperçu, à mon plus grand désespoir, que c'était un cul de sac. Je me retournais et m'apprêtais à sortir lorsque je vis deux silhouettes noirâtres à l'entrée. Oh, non...

    « Eh, toi ! Qu'est-ce que tu fous là ? »

    « Rien. Je me promenais juste. »

    « Ah ouais, en pleins milieu de la nuit ? Te fous pas d'ma gueule ! »

    Merde. C'était deux jeunes, d'environ la vingtaine, qui avançaient d'un air mauvais en ma direction. Ils n'avaient pas l'air content et je savais très bien que si personne ne passais par là dans les prochaines trente secondes, j'allais déguster. Je n'ai jamais autant détesté compter les secondes dans ma tête. Celui qui parlait depuis tout à l'heure (et qui semblait être le chef) s'approcha de moi, me plaqua violemment contre le mur et releva ma tête en m'arrachant à moitié les cheveux. Je lui offrit un regard mauvais et serra les dents.

    « Ici, c'est notre territoire, p'tit merdeux ! »

    « C'est ça, sens toi puissant juste parce que tu as un couteau dans la main, pauvre merde. »

    J'aurais dû me taire. Vraiment. Ca aurait été plus simple. Mais non, il faut toujours que je l'ouvre quand il faut pas. Forcément, il l'a mal pris. Très mal pris. Il a approché le couteau de mon oeil droit, et, partant du coin, il a commencé à m'entailler la joue du coin de l'oeil au menton. Ca faisait un mal de chien.

    « Tu souffres, hein ? Et bien saches que de toute façon, même sans couteau, je peux te faire bien plus mal ! »

    Comme pour illustrer ses propos, il m'a enfoncé le genoux dans le plexus solaire, bloquant ma respiration. Il s'esclaffa alors que je m'asphyxiais, puis, au moment ou je reprenait enfin mon souffle, il me décocha plusieurs coup de poings divers et variés, m'éclata la tête contre le sol. Je voyais flou, mais j'étais encore plus où moins conscient. Je sentais le sang dégouliner de mon nez, je sentais également ma plaie sur la joue qui baignait dans le sang. Même ma bouche en était pleine. J'étais encore sonné lorsqu'il m'enfonça son couteau profondément entre les côtes... Avant de me lâcher sur le sol où je m'effondrais. Ma tête buta contre l'asphalte et je sentais le vide se faire dans ma tête lorsqu'une forme noire déboula dans la ruelle, mis K.O. mes agresseurs et se pencha vers moi... 

    Mais mes yeux étaient déjà fermés. J'avais déjà plongé dans l'inconscience.

    Le Noir Profond.

     

     

    *Vraiment ? Ce garçon est le frère de ma copine ? Impossible.


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  • J'ai ouvert les yeux avec lenteur. Ma tête me lancinait, mes côtes me brûlaient, et j'avais encore du mal à respirer. Je sentais les multiples plaies qui parsemaient mon corps me lancer, et je gémis doucement.

    Toujours lentement, j'essayais de me relever. Mais la douleur, insoutenable, me força à me rasseoir. Sur le lit. Le lit ? Je regardais autour de moi. J'étais dans une pièce sombre, les rideaux étaient tirés, mais je devinais qu'il devait être tôt le matin où le soir, au coucher du soleil.

    Je toussais doucement. D'un coup, un feu brûlant s'empara de mes entrailles et je me courbais... Et j'entendis les bribes d'une conversation - une dispute.

    « ... Faire ça ?! T'es vraiment un imbécile ! »

    « Quoi, t'aurais préféré que je le laisse crever ? »

    Silence.

    « ... Non. Mais il y avait sûrement un autre moyen. »

    « Ouais, bah, dans la panique, j'l'ai pas trouvé. » Il chuchota. « ... ang... partout... »

    « Je le sais bien, Arashi-kun... »

    « Bon, allez, j'me casse. J'te laisse t'en occuper. »

    Soupir de l'interlocutrice.

    Bruit de porte qui se referme.

    Puis, un "toc toc" timide à la mienne.

    « Oui ? »

    « Karasu-kun ? Ca va ? »

    « Suika ! »

    Faisant fit de la douleur, je tentais de nouveau de me lever pour la prendre dans mes bras, mais je retombais au sol.

    « Ouch... »

    Elle accouru à mes côtés, me releva et me força à m'asseoir.

    « Mon frère t'as trouvé étendu par terre dans une ruelle. Il fait des études pour devenir infirmier, alors il t'as soigné. Ca va ? Tu as besoin de quelque chose ? »

    Son frère ? Elle parlait bien de l'autre abrutiolle énervé h24 ? Je n'arrivais pas à y croire.

    « Non, c'est bon... Merci beaucoup. »

    J'avais toujours l'impression qu'un volcan entrait en éruption à l'intérieur de mon corps. La douleur, insoutenable, irradiait dans chacun de mes muscles. Suika resta quelques instant avec moi. Elle m'appris que deux jours avaient passés, deux jours pendant lesquels j'avais dormis. Nous étions donc Dimanche, il était 20h et elle me proposait de passer la nuit chez elle. Nous retournerions au lycée le lendemain. 

    Toujours exténué, j'acceptais et me recouchais avant de m'endormir de nouveau. Je la remerciais cependant d'un baiser et elle me gratifia d'un sourire avant de s'éclipser.


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  • J'ai l'impression que le temps passe super vite. Quelques jours ont passé, et j'ai l'impression que quelques heures seulement ce sont écoulées.

    Ce matin, en me levant, j'ai ôté le bandage que j'avais autour du torse. Je n'avais rien, pas la moindre petite égratignure... Alors que je m'étais tout de même pris un coup de couteau, ce n'était pas rien. En enlevant les pansements sur mon visage, j'ai remarqué la même chose : il n'y avait plus aucune marque. J'étais pourtant prêt à vivre avec une cicatrice me barrant le visage jusqu'à la fin de mes jours...

    Ma maison, d'ordinaire silencieuse, c'est animée de bruits que je ne pensais même pas exister. L'eau dans les canalisations, les murs qui craquent perpétuellement, et même le son des pattes des fourmis dans la véranda.

    Mais qu'est-ce qu'il m'arrive ?

    C'est ce que je me demande depuis ce jour là.

    J'ai besoin d'une réponse, et vite.

    J'ai pris mon manteau, aie lacé mes démonias, et suis partit en courant... Vers la maison de Suika. J'ai frappé à la porte. Personne n'a répondu, alors j'ai insisté. J'étais certains qu'il y avait quelqu'un à l'intérieur de la maison. Je le sentais.

    Au bout de quelque minutes, la porte s'est entrouverte. En face de moi...

    Arashi. 

    Les cheveux en batailles, les yeux plus clairs que d'habitude, l'air mécontent.

    « Tu veux quoi ? »

    J'ai pris mon courage à deux mains, même si j'étais terrorisé.

    « Je... Je veux savoir ce qu'il m'est arrivé. »

    « Et merde... »

    Il a ouvert la porte encore plus grand et m'as dit d'entrer. J'allais me déchausser mais il me fit signe que ça ne servait à rien.

    « Ecoute mon grand, j'ai pas l'droit de te dire quoi que ce soit. »

    « Et pourquoi ? »

    « Pas'que j'ai reçu des ordres. Tout ce que je peux te dire, c'est qu'à partir d'maintenant, ta vie va changer. »

    Génial.

    « Et pas en bien, je suppose ? »

    Il a découvert ses dents et m'a offert un sourire carnassier.

    « Ca, ça ne dépends que de toi. »


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